Fidèle à son principe original de journées complètes de musique baroque au début de l’été, le festival propose en 2023 un nouveau parcours de cinq dimanches et de douze concerts. Deux ou trois programmes par date, organisés autour de thématiques différentes, une rencontre et des échanges avec les artistes, ainsi que la possibilité de déjeuner sur place, fondent l’identité d’un projet ambitieux qui trouve dans l’exceptionnel site abbatial un écrin idéal. Si l’orgue historique JeanBoizard (1714), ornant la tribune occidentale depuis plus de 300 ans, a suscité l’idée du festival, il prend place aujourd’hui dans un ensemble principalement nourri de programmes vocaux et instrumentaux, sacrés ou profanes.
Cette édition témoigne à nouveau de cette orientation et la présence de William Christie pour une journée entière exceptionnelle, en clôture le 2 juillet, illustre ces complémentarités avec éclat : entouré de certaines des plus belles voix actuelles, des Leçons de Ténèbres de Couperin, en tribune, à l’opéra de Purcell Oido and Aeneas, le maître des Arts Florissants souligne en l’occurrence la spécificité du rendezvous thiérachien. Le programme 2023 confirme en outre, au-delà de son rayonnement national et international, la dimension territoriale départementale de ce projet musical. La présence habituelle de Fabio Bonizzoni et de La Risonanza s’appuie sur une action pédagogique régulière menée parallèlement en direction des conservatoires et écoles de musique. Celle de Julien Chauvin et du Concert de la Loge procède par ailleurs d’une résidence artistique en développement soutenue par le Ministère de la Culture et le Département de l’Aisne, qui s’exprime du nord au sud de l’Aisne, et de la Cité de la musique et de la danse de Soissons au Festival de Laon. Le festival de l’Abbaye se place ainsi au carrefour des réalisations de l’ADAMA* dans le domaine baroque, au-delà même de son propre programme, en tant que partenaire de projets élargis. C’est le sens de sa participation au nouveau programme engagé cette année à Plomion autour du patrimoine singulier des églises fortifiées de Thiérache.
Ainsi que de sa contribution au cycle « Bach-Leipzig / 1723-2023 », articulé autour des grands chefsd’ œuvre que sont les Variations Goldberg et I’ Art de la fugue. Accueilli par la Ville de Saint-Michel en Thiérache, propriétaire du site, grâce à l’aimable accord du clergé, le festival s’appuie sur l’Association des Amis du site abbatial et constitue l’événement baroque du nord de la France. li est ancré ou cœur du dispositif musical conduit et soutenu par le Conseil départemental de l’Aisne avec l’ADAMA*, qui en assure la direction artistique, notamment grâce aux concours publics principaux de l’Etat, du Déportement, de la Ville, de la Région Hauts de France et des mécènes.
Le programme du Festival de l’Abbaye de Saint-Michel en Thiérache témoigne à nouveau de sa vocation à être à la fois un important facteur de rayonnement du site abbatial et de l’Aisne, mais aussi à constituer un maillon essentiel du projet musical départemental. C’est le sens de la présence régulière d’artistes éminents qui interviennent par ailleurs en cours d’année pour mener des projets pédagogiques avec nos écoles de musique. Premier soutien du festival, le Conseil départemental de l’Aisne encourage ainsi une ambition artistique conjuguée à un profond enracinement local.
Nicolas Fricoteaux
Président du Conseil départemental de l’Aisne
À travers la direction artistique du Festival de l’Abbaye de Saint-Michel en Thiérache, l’ADAMA noue et coordonne des collaborations qui se renforcent singulièrement en 2023 avec différents acteurs culturels de l’Aisne. Le lancement cette année à Plomion d’un projet musical complémentaire autour des églises fortifiées l’illustre avec éclat. Comme le projet Bach-Leipzig 1723-2023, qui passe par Laon et Soissons et s’exprime au-delà du Baroque jusque dans la modernité. Je me réjouis donc que, fidèle au projet initial, cette édition du festival soit aussi une promesse de nouveaux horizons.
François Rampelberg
Président de l’ADAMA – Vice-président du Conseil
départemental de l’Aisne
L’édition 2023 du festival de l’Abbaye de Saint-Michel en Thiérache va nous permettre une nouvelle fois de passer de formidables moments dans la convivialité qui en est l’une des caractéristiques. Grâce à l’action déterminée des amis du site abbatial et de l’ADAMA, c’est un programme de haute qualité qui est proposé. Désormais, les travaux de sauvegarde du logis des hôtes sont achevés et l’étude d’aménagement intérieur est lancée. La prochaine étape va concerner la restauration des emmarchements et du parvis. Le développement du site abbatial se poursuit avec les aides essentielles de l’État, du Département de l’Aisne, de la Région Hauts-de-France et de la Fondation du Patrimoine. Je vous remercie de votre fidélité renouvelée. Celle-ci nous invite à consacrer plus d’énergie encore au service de ce joyau bénédictin.
Thierry Verdavaine
Maire de Saint-Michel
G. B. Pergolesi
Intermezzo / Livret de G.A. Federico
À Paris en 1752, le “succès de fureur et de fanatisme” de l’opéra miniature nourri de Commedia dell’Arte de Pergolesi, source de la fameuse Querelle des Bouffons opposant les styles lyriques italiens et français. Une polémique nourrie par Rousseau pour qui “ le chant français n’est qu’un aboiement continuel” face à La Serva Padrona, “modèle d’unité de mélodie, de dialogue et de goût”. Un divertissement comique au centre d’un moment d’histoire riche de passions, entre émotion et raison.
Andrea Falconieri | Juan Hidalgo Polanco | José Marín | Jean-Baptiste Lully
Michel Lambert | Carlos Patiño | Gaspar Sanz | Sébastien Le Camus | Etienne Moulinié
Un concert exceptionnel à l’occasion de l’inauguration de l’église restaurée de Plomion, l’une des soixante églises fortifiées de Thiérache, édifiées entre le XVIe et le XVIIe siècle, témoins des guerres civiles et religieuses qui ont ravagé ce territoire de François 1er à Louis XIV, de Charles Quint à Philippe IV d’Espagne. Un panorama de musique vocale et instrumentale illustrant l’excellence artistique promue par ces souverains dans le contexte des turbulences historiques. Un programme franco-espagnol évoquant les temps de guerre et de paix, autour du Traité des Pyrénées conclu entre Louis XIV et Philippe IV pour mettre fin au conflit entre les deux nations.
George Friedric Handel
Ouvertures, concertos et airs d’opéras
Ariodante / Lotario
Giulio Cesare in Egitto / Alcina
Les airs les plus passionnés et émouvants des grands ouvrages dramatiques qui ont fait la gloire londonienne de Händel. D’Alcina à Cleopatra, les rôles tourmentés de femmes de pouvoir exacerbés par la virtuosité, à travers un art du théâtre conjuguant violence et sensibilité. Entre puissance et faiblesse, une série de figures légendaires, reines ou magicienne, sous l’emprise des passions humaines, exaltantes ou cruelles.
J.F. Dandrieu – A. Campra
J.B Morin – N. Bernier
Motets et pièces d’orgue
À la tribune de l’orgue historique de l’abbaye construit en 1714, huit ans avant le sacre de Louis XV, un panorama vocal et instrumental de l’art religieux de Versailles au temps du souverain. Autour de Jean-François Dandrieu, claveciniste virtuose et organiste de la Chapelle royale dès 1721, les traces d’une musique d’une grande inventivité et les échos d’une ère nouvelle. De Campra à Bernier, le témoignage d’un style portant volupté des voix et brio instrumental au plus haut niveau d’inspiration.
G.B. Pergolesi
A.Vivaldi
Motet Nulla in Mundo Pax sincera
Chef-d’oeuvre emblématique du baroque religieux italien, plebiscité à Paris, le Stabat Mater de Pergolesi restitué ici par un sopraniste et un contre-ténor, dans les conditions de sa représentation à la cour de Louis XV par les castrats de la chapelle royale de Versailles. Des pages intensément populaires conjuguant sensibilité et virtuosité, aux côtés de celles de Vivaldi dont un motet et le même Stabat Mater rivalisen d’exubérance et de dramatisme solaire.
Heinrich Schütz
Geistliche Chormusik
Kleine geistliche Konzerte
Au sommet du XVIIe siècle luthérien, le plus grand prédécesseur de Bach, héritier de la tradition européenne du nord et imprégné de culture italienne grâce à son séjour vénitien. La ferveur d’une musique alliant science de la polyphonie et souplesse mélodique au carrefour des styles, exaltant joies et souffrances. Le lyrisme empreint d’affliction des petits concerts spirituels ouvrant la voie à la cantate allemande et la luminosité de la musique spirituelle pour choeur de 5 à 7 voix.
Johann Sebastian Bach
Aria avec quelques variations pour
clavecin à deux claviers BWV 988
Le monumental et mythique chef-d’oeuvre du cantor de Leipzig pour le clavier. Une somme technique et intellectuelle sans équivalent, dont le titre est redevable au fameux élève de Bach, Johann Gottlieb Goldberg, susceptible de meubler avec ces pages les insomnies de son maître commanditaire de l’oeuvre, le comte von Keiserling. Entre l’Aria initial et sa reprise conclusive, un art condensé de l’écriture pour clavier, d’inventions en toccatas et de duos en canons, en passant par l’Ouverture à la française centrale, à l’acmé d’un cycle surnaturel.
Johann Sebastian Bach
Cantate Ich habe genug BWV 82
Suite d’orchestre n°1 BWV 1066
Double concerto pour hautbois et violon BWV 1060
Jan Dismas Zelenka
Lamentation
L’art total de Bach, du Konzertmeister au Cantor. La première des quatre Suites d’orchestre en forme de grand divertissement, entre ouverture à la française et danses stylisées, aux côtés d’un double concerto mêlant rhétorique germanique et style italien. Pour l’église, l’une des plus fameuses pages du grand cycle de cantates de Leipzig, dont l’alternance de récits et d’arias anime le style concertant. Une manière distinguant aussi le catholique Zelenka dans ses Lamentations, admiré par son contemporain Bach pour sa maîtrise de l’écriture et ses harmonies novatrices.
A.Willaert /G. Cavazzoni
G. Gabrieli / G. Palestrina
G. Priuli / M. Neri
Les cornets et trombones des Piffari, emblème sonore de la République de Venise et de la magnificence des doges. Une symphonie de timbres éclatants mêlés à ceux de l’orgue pour solenniser les fastes de la Sérénissime et promouvoir son rayonnement européen. Les échos des canzone, hymnes et sonates déployés sous les voûtes de San Marco, chapelle privée des princes et creuset d’une effervescence musicale unique.
G. F. Händel
Zadok the Priest / Let thy hand be strengthened
The King shall rejoice /My Heart is Inditing
Te Deum de Dettingen
Marches pour tambours et trompettes en ouverture d’un programme cérémoniel vibrant aux accents händéliens. Les musiques du couronnement de George II et de la Reine Caroline à Westminster en 1727, aux côtés du grand Te Deum de Dettingen, en témoignage de la puissance de la couronne d’Angleterre. Des pages vocales et instrumentales dévolues au service des souverains, entre pouvoir émotionnel et pouvoir politique à la recherche de l’adhésion des foules.
François Couperin
Trois Leçons du Mercredy
Au terme du règne de Louis XIV, le chef-d’oeuvre de Couperin commandé par les Dames religieuses de l’abbaye de Longchamp, pour l’Office des Ténèbres de la Semaine Sainte. L’art du récit et de la ductilité vocale, au sommet d’un classicisme français nourri de sève italienne. La haute inspiration spirituelle d’une musique profonde, parée des atours du beau chant propre à séduire aussi les foules les moins dévotes. Des pages exactement contemporaines de l’orgue de l’abbaye de Saint-Michel en Thiérache (1714), ajoutant ici à leur grandeur l’émotion d’une restitution instrumentale « historique ».
Henry Purcell
Opéra en un prologue et trois actes
Livret Nahum Tate
Entre amour et devoir, le destin tragique de Didon, reine de Carthage éprise du prince troyen Enée. Représenté en 1689 près de Londres, le chef-d’oeuvre dramatique de Purcell entre sujet antique et baroque anglais, culminant avec l’une des plus poignantes et fameuses lamentations du répertoire d’opéra. Le monde de l’Enéide et ses dualités, à la fois cruel et doux, maniant le registre de la souffrance comme celui du merveilleux et du comique, animé d’elfes et de sorcières.
E. Jacquet de la Guerre / A. Dornel
M. Pignolet de Montéclair / J.B. Lully
Mlle Duval
Le mariage de la poésie et de la musique réalisé par la cantate française, à travers la mise en scène principale de personnages de la mythologie. Un genre domestique empreint de théâtralité, où les peintures de caractères côtoient l’histoire et la légende. Du Tombeau de Clorinde à la Plainte d’Armide, le triomphe d’une expressivité vocale et d’un art instrumental qui n’oublient pas l’influence italienne. Avec Mademoiselle Duval, la révélation d’une compositrice jalonnant la production française entre Lully et Rameau.